Ep.6: Intuition naturelle et artificielle

On a longtemps cru que l’intuition était une sorte de mythe, qu’elle n’existait pas ou pire, qu’il n’avait d’intuition que féminine. Eh bien, c’était faux, elle existe et ne fait pas de détail quant au genre des intuitifs. Voici comment ça marche.

Notre cerveau est fait pour l’action. Mais pour agir, il doit prendre une décision. Tout va bien dans deux cas. Le premier est le réflexe. Dans ce cas une réaction est prévue suite à l’activation d’une sorte de gâchette, en mode automatique, du tac au tac. Cette règle peut souvent être représentée par un proverbe, un slogan. Les militaires et les médecins par exemple utilisent beaucoup de ces phrases, parfois sous forme de sigles.. Par exemple MATH pour l’évaluation médicale « Maladie connue, allergies, traitements en cours, hospitalisation récente ». Ces réflexes sont mimés dans les shadoks avec le fameux marin philosophe. « Peinture sur crasse = propreté ». Si quelque chose est sale alors il faut le peindre. Il n’y a pas à réfléchir.

Le second est le cas où l’expertise est possible. C’est le monde du diagnostic. Par exemple un expert d’assurance va évaluer le coût d’une réparation en fonction d’un ensembles de règles qu’il connait. Normalement, un autre expert devrait arriver au même résultat. On peut rêver. Lorsque les experts ne sont pas d’accord, ce qui arrive aujourd’hui souvent, le doute s’instille puis s’installe…. et les complotistes rappliquent aussitôt.

Malheureusement ces deux cas sont une toute petite fraction de ce qui fait notre vie quotidienne. La plupart du temps nous n’avons pas de proverbes ni assez d’expertise pour prendre une décision. Or la décision doit prise. On parle alors de ce que l’on sent ou pas, de nos tripes, de notre nez. Est-ce irrationnel?

Les neurociences (10.1523/JNEUROSCI.2312-12.2012) permettent de regarder dans le cerveau les processus à l’œuvre notamment grâce aux progrès de l’imagerie en temps réel. Elle sont extrêmement curieuses….L’intuition pourrait être la conjonction d’une expérience (et non d’une expertise) et d’un désir, d’une volonté. La curiosité nous permettrait d’accumuler des expériences pour faire notre expérience de la vie. Puis quand une situation nouvelle arrive, pour laquelle nous n’avons aucune expertise mais une urgence à prendre une décision, notre cerveau fait une sorte d’inférence sans qu’il ne nous soit possible de vraiment justifier la conclusion à laquelle on arrive.

Le reproche souvent fait aux réseaux de neurones profonds de faire la même chose revient finalement à critiquer le fonctionnement de notre propre cerveau. Or, ces processus sont centraux dans les décisions politiques, stratégiques, les choix commerciaux… Combien de fois ne vous êtes vous pas engagé dans une relation privée ou commerciale juste parce que vous « ne le sentiez pas »?

Volonté et expérience. Il faut les deux. Sans volonté, pas d’intuition. Avec une expérience trop faible engendrée par le manque de curiosité, pas d’intuition ou pire fausse intuition.

C’est stratégique d’avoir de l’expérience… Et cela s’obtient en faisant des expériences.

La recette n’est pas neuve. C’est celle de l’empereur Marc-Aurèle quand il écrit ses « pensées pour moi-même » qu’il n’a pas notées pour qu’elles soient publiées mais juste pour lui. Il accumule de courtes réflexions dont l’ensemble constitue un référentiel d’expériences permettant de prendre des décisions.

Voici alors notre phrase réflexe « Pour avoir de l’expérience, je dois avoir des expériences »


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